Compte courant bloqué : « Chronique d’une mort annoncée »

La loi Pacte interdit la mise en place de nouveaux CCB. Doit-on comprendre de ce texte que les nouvelles échéances de CCB existants seront aussi interdites ?

Compte courant bloqué : « Chronique d’une mort annoncée », Eres Group

Le Compte courant bloqué (CCB) est un compte ouvert dans les livres de l’entreprise. Il sert à accueillir les primes de participation que les collaborateurs choisissent d’y verser. L’entreprise doit consacrer ces sommes à des investissements et en contrepartie de ce « prêt » accordé par les salariés, ceux-ci sont rémunérés chaque année et pendant les 5 ans de blocage des sommes (sauf cas de déblocage anticipé) par un intérêt (versé et imposable sur le revenu ou capitalisé et exonéré d’impôt sur le revenu). Ce taux d’intérêt, prévu par l’accord de Participation, est a minima égal au Taux Moyen de rendement des Obligations des sociétés Privées (TMOP) soit actuellement 0,97% par an.

Depuis ces dernières années et la baisse constante des taux d’intérêt, les entreprises ont préféré d’autres sources de financement et se détournent du CCB qui :

  • Soit est à taux fixe et coûte désormais potentiellement extrêmement cher lorsque perdurent des taux historiques à 6% (ancien taux fixe imposé avant l’introduction de la référence au TMOP), ou dérogatoires contractuels de 7%, 8%, voire 10% par an;
  • Soit suit le TMOP et dans ce cas le rendement est alors d’environ 1% par an ces dernières années ce qui couvre à peine l’inflation et en fait un placement sans rendement pour les salariés.

De plus, s’agissant des CCB dont le taux d’intérêt est très élevé et aujourd’hui décorrélé des taux d’intérêt du marché, on pourrait également se poser la question du risque de requalification en acte anormal de gestion en cas de contrôle. En effet, qu’est ce qui justifie qu’un préteur soit rémunéré 7% ou 8% par an alors que les taux d’emprunt sont à peine de 1% ?

En conclusion, il y a toujours des mécontents : soit l’entreprise car le CCB lui coûte déraisonnablement cher, soit les collaborateurs car il ne leur rapporte plus rien.

Il peut par ailleurs, y avoir un enjeu de trésorerie pour l’entreprise au bout des 5 ans lorsque la Réserve Spéciale de Participation doit être remboursée en totalité aux collaborateurs et qu’elle n’a pas su (ou pas pu) anticiper et provisionner suffisamment.

Surtout cette dette de l’entreprise envers ses salariés présente un risque de non remboursement en cas de défaillance de l’entreprise. A court de liquidités, elle peut être dans l’impossibilité de rembourser les salariés et l’AGS (assurance garantie des salaires) qui ne joue qu’en cas de liquidation est plafonnée et rembourse avant le compte courant bloqué les autres créances comme le salaire et les indemnités.

Pour toutes ces raisons, ce système créé en même temps que la Participation en 1967 a fait long feu. La Loi du 9/11/2010 portant réforme des retraites avait étendu l’obligation d’ouvrir un PEE lorsqu’il y a déjà un CCB pour recueillir la participation et permettre aux salariés de choisir entre les dispositifs.

La loi Pacte enfonce un peu plus le clou et interdit la mise en place de nouveaux CCB. Doit-on comprendre de ce texte que les nouvelles échéances de CCB existants seront aussi interdites ?

Espérons que les ordonnances et/ou décrets à suivre préciseront le sort des CCB préexistants ou l’orientation des futurs flux de participation des entreprises qui disposaient d’un CCB.

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