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Les « management packages », outils essentiels du capital-investissement, alignant les intérêts des actionnaires et du management en termes de risques et de gain potentiel font l’objet de débats sur leur traitement fiscal et social depuis plus de dix ans.
Nous avions commenté les différentes décisions rendues par le Conseil d’Etat et la Cour de cassation dans notre article Management Packages : la requalification des gains en salaire.
Depuis ces différentes décisions, une insécurité juridique s’est installée, remettant en cause la qualification des gains en capital (régime des plus-values de cession de valeurs mobilières) et favorisant leur requalification en salaire.
Le nouvel article 163 bis H du Code général des impôts introduit dans la loi de finances pour 2025, vise à sécuriser le traitement fiscal des managements packages en définissant, un seuil en-deçà duquel le gain réalisé sera considéré comme une plus-value, et au-delà duquel il sera considéré comme une rémunération, imposé en tant que traitements et salaires, dès lors qu’il est lié à la qualité de dirigeant ou de salarié.
Quels sont les gains concernés par le nouveau régime ?
Le texte vise les gains acquis en contrepartie des fonctions de salariés ou de dirigeants (montages concernés par la jurisprudence du Conseil d’Etat) et non les gains acquis par la simple qualité d’investisseur.
Le champ d’application du nouveau régime inclut aussi bien les gains de cession d’instruments qualifiés par la loi (actions gratuites, stock-options, BSPCE), que d’instruments non qualifiés (actions de préférence).
Quelle est la fiscalité applicable ?
Le texte fixe une limite mathématique pour calculer le régime fiscal et social des gains concernés :
Lorsque le multiple de performance financière de l’entreprise (évolution de la valeur de la société entre deux cessions successives) est inférieur ou égal à trois, alors la plus-value de cession est imposable selon le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières (« flat tax » de 30% avec application des mécanismes de report et sursis d’imposition en cas d’apport) sous réserve de respecter les conditions suivantes :
- Dispositifs « qualifiés » : les titres cédés doivent présenter un risque en capital (aléa du prix de cession par rapport à la valeur d’acquisition ou de souscription) ;
- Dispositifs « non-qualifiés » : les titres cédés doivent présenter un risque en capital et avoir été détenus depuis au moins deux ans.
Lorsque le multiple de performance financière de l’entreprise est supérieur à trois, alors la part de plus-value de cession correspondante est imposable dans la catégorie des « traitements et salaries » à un taux max de 59%, sans possibilité de sursis ou de report :
- Application du barème progressif de l’impôt sur le revenu et de la CEHR (ou taux marginal global de 49%)
- Augmenté d’une contribution salariale libératoire de 10%[1]
[1] Article 137-42 du Code de la sécurité sociale (nouveau)
Quelle est la formule de calcul ?
Le calcul du seuil suit la formule mathématique suivante :
P x (3 x VR sortie / VR entrée – 1)
Avec :
- P : prix payé pour la souscription ou l’acquisition des titres (ou à la valeur à la date d’acquisition pour les actions gratuites)
- VR sortie : valorisation de l’entreprise à la cession des titres concernés
- VR entrée : valorisation de l’entreprise à la date d’acquisition/souscription des titres concernés
Quels packages sont concernés ?
Les packages non encore débouclés et seulement pour le dernier tour de LBO s’ils ont fait l’objet d’apports successifs par le passé. En revanche, les opérations passées restent sous le cadre de la jurisprudence existence ce qui entraîne des différences de traitement sur des management packages identiques.
En cas d’opérations d’apport dans le cadre de LBO successifs, la limite des trois fois est calculée à chaque tour de LBO sur la base de la valorisation de la société au moment du nouvel apport.
Conclusion
Le texte a le mérite d’offrir un cadre plus sécurisé aux opérations futures tant au niveau fiscal que social en apportant une distinction claire entre plus-value et traitement et salaires, ce qui évite une requalification totale.
En revanche, les commentaires de l’administration fiscale seraient les bienvenus pour encadrer l’application du texte aux packages en cours. De plus, derrière une apparente sécurisation juridique, cette réforme entraînera également un plafonnement mécanique des opérations de management package, compliquant davantage l’accès des managers au capital de leurs entreprises (LBO).