Actionnariat salarié et loi Macron : accélérateur ou simple compensation des reculades des dernières années ?

La Fédération des Actionnaires Salariés a demandé à Eres d’intervenir lors d’une table ronde sur ce sujet lors de la remise des prix de l’actionnariat salarié le 15 décembre 2015. Nous reprenons ici le contenu de notre intervention.

Actionnariat salarié et loi Macron : accélérateur ou simple compensation des reculades des dernières années ?, Eres Group

1/ La France est le leader européen incontesté de l’actionnariat salarié. Dans les grandes entreprises cotées il est deux fois plus développé que dans la moyenne de l’Union Européenne

Sur les grandes entreprises cotées, la France est leader à la fois :

  • en nombre d’entreprises qui associent les salariés à leur capital (80% en France/47% dans l’UE) en proposant des plans démocratiques,
  • en nombre de salariés qui participent (44% France/26% UE),
  • en fréquence des opérations (1 tous les trois ans en moyenne dans les grandes entreprises cotées), en % du capital détenu par les salariés (3,9% France/1,6% UE)

2/ Mais elle est en grand retard dans le non coté

Il est pour le moment difficile d’avoir des statistiques fiables (Eres s’y emploie pour 2016 !) disponibles, mais comparativement aux Etats-Unis où 1/3 des entreprises non cotées ont 10 millions de salariés actionnaires, nous sommes en retard. Or, c’est bien dans ce tissu du non coté qu’une partie de l’énergie entrepreneuriale d’un pays se déploie.

3/ Cette situation d’avance dans le coté et de retard dans le non coté a plusieurs causes (liste non exhaustive) :

En positif :

  • L’actionnariat salarié dans le PEE et le véhicule FCPE, très faciles à utiliser en environnement coté,
  • La création des actions gratuites à l’origine favorables en traitement social et fiscal,
  • L’obligation de déployer un plan collectif quand on attribue des options ou des actions gratuites (de performance ou non) à un ou des mandataires sociaux : cette obligation a (oh surprise :-)) fait progresser les très grands plans d’actions gratuites collectifs ces dernières années,
  • Les BSPCE qui ont échappé au matraquage pour les entreprises les plus jeunes,
  • La séparation nette entre épargne retraite et association au capital.

En négatif :

  • L’instabilité réglementaire et fiscale,
  • L’hétérogénéité des situations des entreprises et le manque de vrais spécialistes en nombre suffisant pour les aider à structurer et déployer leur actionnariat salarié,
  • Le matraquage fiscal des options et des actions gratuites, et la création puis la hausse massive du forfait social, qui ont pénalisé les opérations et freiné les plans ces dernières années,
  • Le relatif manque de souplesse ou de sécurité des instruments non cotés par rapport aux deux grands sujets que sont la liquidité et la valorisation,
  • Du diable dans les détails : limites des BSPCE par rapport aux besoins des PME de croissance dans leurs opérations de… croissance externe, insécurité fiscale du PEA, inefficacité du FCPE de reprise pour la transmission, Retrait des acteurs industriels des prestations pour TPE et PME, Stupidité absolue de la contrainte de part de distribution des FCPE (jusqu’à 40€ de frais pour une opération de versement de quelques euros de dividendes, avec complexité de la communication, édition d’un IFU… )…

4/ La loi MACRON va-t-elle relancer le sujet ?

Il y a indéniablement du mieux :

  • En traitement social et fiscal : on revient à du plus raisonnable/acceptable pour les actionnaires et les bénéficiaires sur les actions gratuites;
  • En souplesse et simplification  (pour caricaturer on pourrait dire qu’il y a un peu moins de kolkhoze et un peu plus de ciblage sur les actions gratuites. Par ailleurs les conditions d’utilisation des BSPCE sont améliorées pour les besoins de croissance externe des PME de croissance, et nous avons eu la peau de cette fameuse part « D » des FCPE, contre-productive…)

D’ailleurs une vague de projets remonte depuis la rentrée de l’été dans des entreprises de toutes tailles : il y a de l’appétence !

5/ Mais va-t-elle assez loin ?

NON, la loi Macron rate plusieurs objectifs pour vraiment libérer l’actionnariat salarié :

  • Elle améliore les gratuites mais pas les options….qui, bien utilisées, sont pourtant plus vertueuses;
  • Elle ne touche pas au forfait social sur l’abondement lié à l’actionnariat salarié dans les PEE;
  • Elle rate le sujet sécurisation fiscale et sociale et laisse inchangée une situation où les « solutions créatives de contournement » compliquent la tâche et alimentent le contentieux;
  • Elle rate le sujet gouvernance/relations avec les actionnaires salariés dans les petites entreprises;
  • Elle rate le sujet transmission, qui est pourtant un enjeu essentiel pour notre tissu d’emplois

Il est donc indispensable de creuser le sillon et d’améliorer encore les dispositifs, d’autres pays le font (UK…) et pourraient en retirer bien avant nous des bénéfices substantiels en termes d’emploi, de performance économique et sociale.

Alors c’est Noël, et Eres vous livre sa liste de cadeaux demandés au Père Noël de l’actionnariat salarié :

1) Baisser le forfait social pour l’actionnariat salarié dans le PEE : au moins alignement sur le forfait à 16% du PERECO (financement des PME), si possible 8% dans les TPE et PME.

2) Passeporter le FCPE au niveau de l’UE pour faciliter les opérations transnationales. Pourquoi pas un 29e régime, optionnel, pour lequel on pourrait opter au-dessus des environnements locaux des 28 Etats membres ?

3) Donner au patron de l’entreprise non cotée des garanties de sécurité fiscale et sociale quand il utilise des instruments de capital au profit de ses collaborateurs.

4) Donner une grande souplesse d’organisation de la liquidité et de la gouvernance aux TPE et PME non cotées.

5) Travailler à fond le volet transmission des PME et ETI aux collaborateurs en mettant en œuvre les leviers identifiés dans le cadre de travaux poussés de Fondact :

  • incitations aux cédants (dirigeants ou actionnaires non opérationnels) / aux salariés repreneurs
  • amélioration des outils : création d’actions gratuites « de reprise », réforme et assouplissement du FCPE de reprise, création du PEE de reprise accueillant les instruments de capital utilisés pour l’opération de transmission.

Et une 6e mesure que nous osons à peine demander : sortir l’actionnariat salarié de l’ISF en reconnaissant les actions du salarié comme outil de travail dès le premier euro.

JOYEUX NOEL !

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